ANALYSES

«Une taxe injuste qui ne touche, parmi les sportifs, que le foot»

Presse
25 octobre 2013
Quel regard portez-vous sur cette taxe à 75 % ?



On est devant une complication parce qu’autant cette taxe à 75 % était tout à fait justifiable si elle portait sur ceux qui touchent les revenus, autant, là, elle touche les entreprises. D’une part, elle va porter sur les contrats déjà signés, et c’est toujours gênant d’avoir une fiscalité rétroactive car cela empêche la stabilité des contrats. D’autre part, cette taxe touche, dans le domaine sportif, uniquement les footballeurs. Elle ne touche pas tous les autres sportifs qui gagnent de gros revenus, qui sont installés à Monaco, en Suisse, comme des tennismen, des golfeurs, des coureurs automobile, etc. C’est vraiment une taxe football. Enfin, elle touche les salaires et non pas les revenus. Tous les acteurs, artistes, chanteurs qui gagnent plus d’un million en honoraires ne sont pas touchés. Il y a donc un caractère un peu injuste dans cette taxe.


Approuvez-vous la grève des clubs ?



Même si on peut avoir beaucoup de doutes sur cette taxe qui va déstabiliser les clubs, qui modifie les règles du jeu en cours de partie, je crains que la grève soit une mauvaise réponse apportée à une bonne question, parce qu’elle n’est pas compréhensible par l’opinion publique. Le gouvernement ne pourra pas reculer sauf à être accusé de faiblesse et de céder à un monde du football, qui, sur cet aspect-là, va ternir son image. On voit déjà sur les réseaux sociaux comment les commentaires se font : «Ce sont des gens qui gagnent très bien leur vie et qui ne veulent pas être solidaires.»


Pourquoi quand on évoque les gros salaires se focalise-t-on à ce point sur le football ?



Parce que le football est plus visible, c’est un sport plus populaire et on reproche plus le salaire à un footballeur qu’à un chanteur. C’est classique. Les salaires, désormais mondialisés, ont énormément augmenté sur les dix dernières années. Mais on ne parle que des salaires les plus élevés des grandes stars ; cela ne concerne pas la majorité des footballeurs professionnels. Dans la mesure où c’est relativement nouveau, le football concentre ainsi des attaques, inconnues d’autres sports. On n’a jamais entendu de protestation contre les gains des tennismen.


Si la taxe est mise en place, le foot français sera-t-il moins attractif ?



Cela va aller en cascade. On peut dire que seuls les clubs les plus riches vont payer. Sauf que Monaco n’est pas concerné puisqu’il ne paye pas les impôts en France. Il y a une première injustice. On peut penser ensuite que le Qatar n’aura pas de mal à mettre la main à la poche pour régler 20 millions d’euros. Mais les autres clubs, les clubs moyens, c’est plus difficile pour eux. Surtout, cela risque de rendre moins attractif le championnat français. Cela pose un vrai problème, même s’il est provisoire. Le football professionnel a déjà perdu pas mal d’argent avec la suppression du droit à l’image collective. Trois ans après, on modifie de nouveau la fiscalité des clubs français. Pour des clubs moyens c’est problématique.


Comment ça se passe à l’étranger ?



Les charges sociales sont plus élevées en France que dans les autres grands championnats européens. Les clubs français sont ainsi pénalisés par rapport aux clubs anglais, allemands, espagnols ou italiens.


Quelle peut être la sortie de crise ?



Il faut trouver un moyen pour que tout le monde sorte avec la tête haute. Attendons la réunion entre le Président François Hollande et le monde du football. Les clubs peuvent demander l’étalement du paiement ou une compensation. Mais sur la taxe elle-même, je pense que c’est non négociable pour le gouvernement. 

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