ANALYSES

Marche pour le climat : le rôle clé des citoyens pour faire évoluer les mentalités

Presse
22 septembre 2014

S’est tenue hier, dans plusieurs villes du monde, la première marche mondiale pour le climat à l’initiative du réseau Avaaz. Dans 158 pays, des manifestations ont été organisées pour alerter les décideurs sur l’urgence climatique et la nécessité de prendre des mesures pour réduire nos émissions de gaz à effet de serre. La mobilisation, auquel la France a participé, a été un succès et envoie un signal important au regard de l’agenda climatique chargé en cette fin d’année 2014.


Le sommet de l’ONU se tiendra ce mardi, avec pour ambition de mettre sur les rails la COP20, organisée à Lima du 1er au 12 décembre 2014 mais aussi et surtout la COP21 qui aura lieu en 2015 et devra convaincre l’ensemble des parties de la nécessité d’un accord global juridiquement contraignant. C’est là un défi immense lorsque l’on considère les échecs précédents en la matière, le sommet de Copenhague restant dans les mémoires comme le grand rendez-vous manqué en 2009. Mais les paramètres ont-ils réellement évolué aujourd’hui ? Disposons-nous de davantage d’espace et/ou d’arguments pour convaincre les plus réticents de l’urgence de la situation et de la nécessité d’une action ambitieuse ?




Si l’urgence ne semble plus faire débat, les obstacles restent de taille. Invité d’une conférence à l’OCDE à Paris le 17 septembre dernier, Michael Bloomberg, ancien maire de New York et depuis peu envoyé spécial de l’ONU pour le changement climatique et les villes, a fait part de ses réserves sur les opportunités de signature d’un accord ambitieux, notamment en raison d’un sénat américain plutôt réfractaire à tout engagement contraignant sur le sujet, paramètre avec lequel Barack Obama sera forcé de composer. Monsieur Bloomberg a même confié qu’il croyait désormais davantage à la puissance du secteur privé et de la société civile pour faire évoluer la donne en comparaison d’Etats pour l’heure peu enclin à fournir à la CCNUCC leurs objectifs de réductions d’émissions. De même, la dotation du Fonds vert pour le climat censé financer les mesures d’adaptation dans les pays en développement n’est toujours pas assurée.


Devant l’ensemble des blocages se pose donc la question de leur déverrouillage. Comme le dit si bien Bill McKibben, leader du réseau 350.org, « il faut que les chefs d’Etat aient peur de revenir chez eux les mains vides ». Une grande partie du problème se situe en effet à ce niveau. Pour que les décideurs politiques se montrent offensifs en matière d’objectifs de réductions de gaz à effet de serre, il faut que cela constitue un paramètre de leur réélection. Et pour cela, il faut que cette problématique devienne centrale pour leur électorat. Or, ce n’est actuellement pas le cas, pour de très nombreuses raisons (difficulté à percevoir le réchauffement climatique et ses impacts, crise économique, lassitude et incrédulité devant les discours catastrophistes, etc.). La prise de conscience ne peut donc faire l’économie d’un investissement de plus en plus important de la société civile à travers un travail de sensibilisation et d’information de la population. A ce propos, la réussite de l’initiative de la marche pour le climat permet, a minima, de ne pas exclure d’évolution sur ce sujet, ce que nous aurons sans doute l’occasion de vérifier tout au long de l’année qui nous sépare de la COP21.


Les lobbies dit « bruns » constituent un autre obstacle de taille et, sans tomber dans l’exagération complotiste, savent utiliser leurs atouts pour peser sur les négociations et défendre leurs intérêts, ne serait-ce qu’en évoquant le nombre d’emplois que pèse leur secteur. Alors certes la société civile peut influencer entreprises et décideurs politiques par des changements de comportement et de mentalité et la pression des urnes. Néanmoins les entreprises à travers leur capacité d’innovation sont une des clés de la réussite de cette transition vers un modèle moins énergivore qui ne peut être impulsé que par l’opportunité (être compétitif et engranger des bénéfices) ou la contrainte, populaire (répondre à des attentes) ou publique (respecter des normes).


Reste à savoir dans quelle mesure et avec quelle intensité ces trois acteurs (gouvernements, entreprises, sociétés civiles), en interagissant et en s’influençant mutuellement, pourront favoriser l’émergence d’un compromis non dénué de sens.


 

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