ANALYSES

Le rapport de force en Egypte évolue-t-il en faveur des Frères musulmans ?

Interview
10 juillet 2012
Il est trop tôt pour le dire ainsi. On est aujourd’hui dans une séquence politique qui confirme une fois de plus que l’Egypte n’est pas parvenue à se stabiliser politiquement et que le bras de fer entre le Conseil suprême des forces armées (CSFA) et les Frères musulmans se poursuit, malgré le compromis que constituait la proclamation du résultat de l’élection de Mohammed Morsi à la présidence de l’Egypte.

Nous sommes dans un processus révolutionnaire. Il y a là deux ordres qui s’affrontent. L’ordre strictement institutionnel, avec la décision prise par la Haute cour de Justice visant à la dissolution du Parlement, pourtant élu par plus de 20 millions d’Egyptiens ; et d’autre part, un ordre politique qui cherche à s’imposer au-delà de l’aspect constitutionnel et judiciaire. Mohammed Morsi s’est d’ailleurs placé en contradiction avec ce projet politique car il a prêté serment aux institutions égyptiennes. Le président n’a toutefois pas de prérogatives clairement établies par une constitution puisque celle-ci n’existe pas encore et c’est bien un des enjeux essentiels du débat.

Le processus révolutionnaire se poursuit donc en Egypte sans que l’on puisse dire à ce jour s’il va plutôt pencher en faveur des Frères musulmans ou en faveur de l’institution militaire. Nous savons que le Parlement est convoqué aujourd’hui même. Je doute cependant que les forces armées le laissent se réunir tranquillement, ou si elles s’abstiennent de toute action cette fois-ci, cela ne signifie pas qu’il pourra se réunir demain ou dans les jours à venir. Nul ne peut dire aujourd’hui comment va se dénouer cette crise. Je pense qu’il n’y aura pas d’affrontements graves. Il y aura peut-être quelques escarmouches, mais la situation ne va probablement pas dégénérer car malgré ce bras de fer qui existe et qui est réel, aucune des deux principales forces en présence, l’armée d’une part, les Frères musulmans de l’autre, ne cherche l’affrontement. Ils recherchent plutôt le compromis, mais comme dans tout compromis, chacun essaie de faire valoir au mieux ses propres intérêts.