ANALYSES

Yuan Zi et Huan Huan, le retour de la « diplomatie du panda » ?

Interview
16 janvier 2012
Par Fabienne Clérot, chercheure à l’IRIS
Un couple de pandas géants arrivera dimanche en France, pour rejoindre le zoo de Beauval.
Les longues tractations, au plus haut niveau politique, ont finalement abouti, à quelques jours de la date anniversaire de l’établissement des relations diplomatiques entre la France et la Chine (27 janvier 1964).
C’est un signe certain du réchauffement du lien entre Pékin et Paris, mis à mal en 2008 par la menace de boycott des JO, le parcours chaotique de la flamme olympique dans la capitale française et la rencontre N. Sarkozy-Dalai Lama.
Depuis 1985, la Chine a officiellement abandonné sa ‘diplomatie du panda’, une longue tradition initiée sous les Tang (en 685, l’empereur chinois avait offert des pandas au Japon) et largement utilisée sous Mao (des pandas avaient été offerts à l’URSS ainsi… qu’au Président américain Nixon).
Depuis cette date, les pandas ne sont plus donnés mais prêtés pour 10 ans par le centre de recherche de Chengdu (Sichuan) à des zoos étrangers, moyennant 1 million de dollars.
Le panda (« xiong mao » en chinois : chat-ours) est l’emblème de la Chine, où il est considéré comme un trésor national. Espèce menacée (c’est d’ailleurs le logo du WWF), victime de la réduction de son habitat naturel et d’un faible taux de reproduction, il y aurait actuellement moins de 2000 pandas en Chine.
En 1973, un ‘couple de pandas’ avait été offert au Président Pompidou (il s’agissait en fait de deux mâles !). Yen Yen est mort en 2000 au zoo de Vincennes. Depuis cette date, il n’y avait plus de pandas en France.
Les pandas qui vont s’installer dans le Loir-et-Cher s’appellent Yuan Zi (‘fils rond’, le mâle) et Huan Huan(1) (‘grande joie’, la femelle). Ils sont nés en 2008 après le tremblement de terre du Sichuan.
La Chine aime se représenter sous les doux traits du panda, animal millénaire, herbivore et non agressif, qui correspond bien à l’image de ‘développement pacifique’ prôné par Pékin(2). La ‘nouvelle diplomatie du panda’, comme en son temps la ‘diplomatie du ping pong’ est l’une des facettes du ‘soft power’ chinois, cette puissance douce que Pékin a décidé de développer depuis quelques années pour lutter contre son déficit d’image à l’étranger.
Alors que le Président chinois, qui approche de sa fin de mandat, a exhorté le PCC à développer la ‘culture nationale’ (« la culture socialiste aux caractéristiques chinoises ») pour lutter contre « l’occidentalisation » du pays, le panda, comme, dans un autre registre, Confucius, fait partie des ‘valeurs sûres’ sur lesquelles la ‘diplomatie culturelle’ chinoise entend s’appuyer.

(1) ‘Huan Huan’ était d’ailleurs le nom de l’une des 5 mascottes des JO de Pékin (bei bei, jing jing, huan huan, ying ying, nin nin – ce qui formait la phrase ‘Beijing huanying nin’ : Pékin vous accueille). Pas n’importe quelle mascotte, c’était… la flamme olympique ! Simple coïncidence ou rappel symbolique de cette année noire des relations franco-chinoises ?

(2) Le panda est un gros animal (de 80 à 150 kg) très vorace, qui dévore jusqu’à 20 kg de bambous par jour… un gros consommateur de ressources naturelles !
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