ANALYSES

Forum annuel européen sur le sport : l’Union européenne chausse les crampons

Tribune
2 octobre 2013
Au niveau du format, cet événement représente tout d’abord la rencontre entre la Commission européenne, les acteurs du monde sportif et la société civile engagée dans le sport. Ce forum est ainsi l’occasion pour la Commission de consulter les parties prenantes au sujet du travail accompli, des nouvelles priorités ainsi que du mode de fonctionnement et de gouvernance de la politique sportive européenne. Par exemple, pour cette édition, les consultations ont concerné la mise en application du chapitre sport d’« Erasmus plus » ce vaste programme de financement de projets et d’échange qui couvrira la période 2014-2020, avec un budget total de trois milliards d’euros, et dont une partie (environ 33 millions d’euros par an) sera affectée à des programmes sportifs amateurs transnationaux, comme des échanges sportifs, des compétitions à but non lucratif, etc.(1)

Une seconde consultation publique concernait le plan de travail de l’Union européenne pour le sport sur les trois prochaines années. Il a été sujet des thématiques et du nombre des groupes de travail qui réunissent des représentants des États-membres ainsi que des experts sur des thèmes sportifs. A des fins de rationalisation, le nombre de ces groupes a été réduit de 6 à 3. Désormais un groupe travaillera spécifiquement sur les questions d’économies du sport (financement, sponsoring, etc ), un autre sur les enjeux sociétaux du sport (promotion de la pratique sportive, sport et santé, etc.), puis un groupe se penchera sur la notion d’intégrité (lutte contre les matchs truqués, dopage, discrimination, violence et racisme). A noter la disparition du groupe sur la « bonne gouvernance », thème qui, pourtant, revient continuellement dans les différentes réflexions, et qui sera abordée de façon transversale.

Outre ces consultations formelles, une table ronde était organisée sur la question du transfert des joueurs, le CDES étant invité à présenter les résultats de leur étude sur les aspects légaux et économiques des transferts des joueurs, ainsi qu’une table-ronde sur la double carrière des athlètes, l’Union européenne ayant publié cette année des lignes directives (« guidelines ») concernant la formation des athlètes et la préparation à leur reconversion.

Enfin, l’objectif était de présenter les projets financés par la commission européenne dans le cadre des « actions préparatoires ». L’IRIS, qui dans ce cadre, dirige un programme européen de séminaires de sensibilisation à la lutte contre les matchs truqués (What national networks to fight against match-fixing ?), a donc pu expliquer les modalités et les premiers résultats de son programme, alors que trois séminaires ont déjà été organisés (Danemark, Suède et Hongrie).

Assurément, ces rendez-vous annuels permettent une rencontre nécessaire entre la Commission européenne, les Etats-membres et surtout les autres parties prenantes de la gouvernance sportive, à savoir les organisations sportives. Le sport est un concept à la croisée de diverses compétences de l’Union européenne : santé, éducation, lutte contre la fraude, libre circulation, bonne gouvernance… et puisque l’Union est un nouvel acteur dans un secteur dont la régulation est l’apanage des organisations sportives, le forum annuel du sport permet d’adapter la politique sportive communautaire aux besoins et au cadre de gouvernance préexistants. Une problématique majeure pour l’Union européenne est celle de la combinaison entre la promotion du sport de masse (« grassroots sport »), et la régulation des problèmes saillants liés au sport d’élite. Les questions de financement ou de bonne gouvernance touchent les deux thématiques. Comme l’explique Jens Andersen de l’association Play The Game, la bonne gouvernance devrait être une condition de l’autonomie du sport. En tous les cas, il est difficile pour l’Union européenne de ne pas empiéter sur les plates-bandes des organisations sportives pour tenter de répondre à certaines dérives du sport professionnel. Les sujets des transferts, de lutte contre les trafics de mineur ou des agents sportifs en sont un exemple.

Un participant du milieu académique a demandé d’imaginer une implication de l’Union européenne dans la coordination des candidatures aux grands événements sportifs, afin que les dossiers de candidature européens ne soient pas en concurrence et profitent d’une solidarité communautaire face aux puissants dossiers des pays émergents. Cette réflexion pourrait être l’opportunité, par ailleurs, de promouvoir un retour vers des événements sportifs à taille plus humaine. L’idée a été reprise hier lors de la réunion ministérielle. Alors que plusieurs villes européennes pourraient être en lice pour les JO d’hiver 2022 (Munich et Stockholm ?), voire pour les Jeux 2024, l’idée ne parait pas hors de propos.

(1) Ce programme « Erasmus + » doit être adopté dans les prochaines semaines par le Conseil de l’Europe et le Parlement européen.