ANALYSES

Une lecture des élections législatives au Kirghizstan

Tribune
9 novembre 2010
Le financement d’Ata zhurt n’est pas clair : d’aucuns y perçoivent une origine bakiévienne ou mafieuse. Son électorat s’est concentré plutôt dans le Sud, notamment dans la région de Djallalabad.

Ce parti dirigera-t-il la coalition parlementaire qui, le 8 novembre, devrait, enfin, donner aux Kirghizes un gouvernement à peu près démocratiquement élu ?

Sur les 120 sièges de députés, Atazhurt, avec le vote de 8,47 % des inscrits, doit en obtenir 28. Pour obtenir une majorité de gouvernement il doit s’allier à des partis dont les positions sont proches des siennes. Seul le parti Ar namys (dignité) du général Koulov, lui aussi hostile à une république parlementaire, est dans ce cas. Mais, avec 7,57%, il n’obtient que 25 mandats. Un troisième parti est donc nécessaire à une coalition gouvernementale « anti-parlementariste » à laquelle il manque 8 députés pour avoir la majorité. Le parti Respublika , avec 23 mandats pourrait fournir cet apport, ce qui donnerait à la coalition 76 mandats.

Mais c’est ici qu’intervient le chef politique de Respublika, le jeune banquier (40 ans) Omurbek Babanov qui tient la clé de la situation avec son parti charnière. En effet, Babanov, ancien du parti socialiste SDPK (26 mandats), peut tout à fait s’allier à ce parti et à celui d’ Ata meken (19 mandats) pour former une coalition gouvernementale « parlementariste » avec 67 mandats.

D’après un entretien assez modéré de Tachiev au journal russe Vremya Novosteï , le 2 novembre, Ata zhourt a conclu une alliance avec Ar Namys et envisage de se retrouver dans l’opposition laissant la république parlementaire montrer ce dont elle est capable. Tachiev en attend, bien entendu, un échec qu’il sanctionnera, une fois à la direction des affaires, par deux referendums marquant le retour à une république présidentielle, c’est-à-dire à un pouvoir autoritaire.

En attendant, le scénario le plus probable demeure celui de la coalition parlementariste plus ou moins appuyée par Washington pendant que Moscou maintient sa préférence pour le régime présidentiel. Réponse le 8 novembre lorsque les partis nouvellement élus auront fait leur choix.

Cette situation appelle deux constats :
1/ le très grand jeu entre grandes puissances se poursuit à Bichkek encadrée par une base américaine et une base russe.
2/ le remue-ménage politique va se poursuivre en Kirghizie : rendez-vous au printemps pour les prochaines émeutes…

(1) Celle, méridionale, de Suzak (près de Djallalabad).
(2) Armée, milice, police, douane, services spéciaux, police fiscale