ANALYSES

Les risques croissants transnationaux en débat à Washington : vers une nouvelle politique américaine ?

Tribune
27 mai 2009
D’une part, cela est dû au fait que la classe politique n’a pris conscience que tardivement de la gravité du phénomène. D’ailleurs, les chefs d’Etat aidés de leurs cabinets et de leurs conseillers, commencent seulement à inscrire ces problèmes sur leur agenda politique. D’autre part, l’enchevêtrement de problèmes délicats demande des solutions élaborées et complexes, issues d’une collaboration fondée sur plusieurs niveaux et entre différents domaines.

A l’avant-garde d’un mouvement de sécurité alternative, le Projet sur la réforme de Sécurité nationale (PNSR) a reconnu l’urgence d’agir dans les plus courts délais. En tant qu’organisation non-gouvernementale bipartite fondée en 2006 et mandatée par le Congrès américain, le PNSR promeut une réforme des institutions du système de sécurité nationale qui fait table rase avec le modèle présent. Conçues par la loi de sécurité nationale de 1947 sous le Président Truman pour contenir le pouvoir soviétique, les structures courantes ne répondent plus aux besoins contemporains et sont simplement obsolètes face aux futurs dangers. La fin de la Guerre froide et la mondialisation – qui s’est imposée à grand pas ces dernières décennies – illustrent le changement de nature radical des relations internationales depuis 1945. Or, la doctrine américaine de sécurité nationale, malgré quelques timides tentatives de réforme, comme la loi de Goldwater-Nichols de 1986 (qui avait pour but de mettre fin aux rivalités entre les différents services de sécurité pendant les opérations militaires, dans les années 1970 et 1980), demeure fondamentalement anachronique.

L’objectif principal de cet évènement fut donc d’abord d’augmenter la prise de conscience des acteurs politiques, tout en passant le message que les problèmes actuels transgressent les frontières territoriales et nécessitent non seulement une meilleure coopération au sein des services nationaux (comme les services de renseignement, la défense, et d’autres ministères), mais également une action collective et une collaboration multilatérale des pays du Nord et du Sud. Tous les experts, diplomates et universitaires réunis à cet occasion ont abordé quatre sujets clés :

– La définition d’une politique et d’une stratégie de sécurité nationale;
– La distinction des principaux problèmes dans la mise en œuvre d’une réforme;
– Les objectifs fondamentaux d’une réforme réussie ;
– Les grandes lignes de débat pour l’avenir.

Les réactions immédiates vis-à-vis de cette entreprise globale à la fin de cette journée de débat furent positives, car cette rencontre a permis de créer la base d’un réseau important afin de soutenir et d’étendre le nombre de collaborateurs et d’acteurs conscients de l’urgence du phénomène. Cette conférence fut d’autant plus importante, qu’elle signifie aussi la mise en œuvre d’une nouvelle politique à Washington. Les hôtes, prêts à mener un véritable dialogue avec les invités, étaient surtout intéressés par les initiatives de réforme récentes prises dans le monde entier, qui visent à restructurer l’administration publique, le secteur de défense, ainsi que le système de sécurité nationale.

Le premier pas de cette ouverture « washingtonienne » fut déjà accompli sous la forme d’un rapport publié en novembre 2008 par le PNSR, intitulé « Forging a New Shield » (Forger un nouveau bouclier) et qui esquisse une réforme radicale du système de sécurité nationale aux Etats-Unis. Tandis que certains experts des pays scandinaves s’interrogeaient sur le maintien du secret de défense nationale, du côté américain, cette question ne s’est pas posée dans les mêmes termes. Il n’est pas question de savoir si les auteurs du rapport pourraient avoir menacé la future doctrine de sécurité nationale américaine. Bien au contraire, cette transparence manifeste que la plus vielle démocratie du monde a repris la bonne direction pour établir un système international multipolaire, dans lequel la coopération multilatérale est la clé pour résoudre les nouveaux défis mondiaux. Le chemin à parcourir demeure long et dur – et la crise économique empêche le gouvernement d’avoir le vent en poupe pour réaliser ces tâches importantes – mais l’essentiel est d’avoir trouvé la volonté politique qui, maintenant et dans l’avenir proche, devrait se traduire par des engagements concrets.