ANALYSES

Assassinat du chef de l’Etat en Guinée Bissau : les raisons d’une instabilité chronique

Tribune
2 mars 2009
Joao Bernardo Vieira avait accédé au pouvoir, à la suite d’un coup d’Etat, entre 1980 et 1999, succédant au leader de l’indépendance Luis Cabral. Il avait été élu en 1994. L’insurrection militaire de 1998 avait conduit à son départ en 1999. Kumba Yala avait été alors élu président en janvier 2000. Puis le coup d’Etat du général Verissimo Seabra Correla avait fait accéder Henrique Rosa au pouvoir avant que le général Seabra ne soit assassiné en 2004. Joao Bernardo Vieira avait été réélu en 2005, 6 ans après la fin de la guerre civile (1988-1999), qui l’avait chassé du pouvoir.

Ces tragiques évènements ne font ainsi que poursuivre une tradition de violence pour un pays où depuis l’indépendance les coups d’Etats se sont succédés sur fond d’instabilité économique, sociale et politique. Aucun président n’a en effet terminé son mandat depuis 17 ans. A la différence des autres anciennes colonies portugaises ayant connu de violentes guerres d’indépendance mais ayant retrouvé aujourd’hui une relative stabilité politique, la Guinée Bissau connut des guerres civiles, des coups d’Etat et une criminalisation de l’appareil d’Etat.

Indépendant depuis 1974, ce petit pays lusophone de 1,6 millions d’habitants, situé entre le Sénégal et la Guinée-Conakry a été dans l’impossibilité de construire une démocratie malgré le multipartisme et des élections. Ils expriment également une corruption généralisée pour un narco Etat qui est devenu une place de transit essentiel de la cocaïne entre l’Amérique et l’Europe. Même s’il existe des gisements miniers et pétroliers, les noix de cajou représentent 90 % des exportations. Membre de l’UEMOA et de la CEDEAO, la Guinée Bissau est sous perfusion (l’aide internationale représente ¾ de son budget). Il s’agit d’un des pays les plus pauvres du monde situé dans les derniers rangs des indices de développement humain.

Il est trop tôt pour savoir quelles seront les évolutions sociales et politiques. L’UE et la CEDEAO ont vivement condamné ces actions en appelant à l’ordre. L’assassinat du chef d’Etat est a priori une réponse à l’attentat contre le chef d’Etat major. A priori l’armée va prendre le pouvoir. Il n’est pas évident que, comme dans le cas de son voisin la Guinée-Conakry, les jeunes militaires cherchent à nettoyer les écuries d’Augias et à réduire le poids des trafics mafieux comme base d’une économie et du pouvoir.