ANALYSES

Victoire de Shinzo Abe : comment le Japon veut revenir mieux « armé » sur la scène diplomatique asiatique

Presse
23 octobre 2017
5 ans après son élection de 2012, Shinzo Abe a décidé de dissoudre la chambre basse du Parlement en septembre dernier. Les élections se sont déroulées ce dimanche 22 octobre. Comment juger cette décision et interpréter les résultats de ce scrutin ?

C’est une victoire importante pour Abe, puisque le PLD récolterait les deux tiers des sièges de la Chambre basse. Mais ce n’est cependant pas une grande surprise, compte-tenu de la difficulté de l’opposition politique, décimée depuis la déroute du parti démocrate en 2012, et d’un contexte sécuritaire difficile qui place le premier ministre en position de force, face aux incertitudes d’une alternance. Le choix de cette élection anticipée était donc judicieux.

Alors que le Japon était réputé pour une instabilité politique très marquée au cours de ces dernières décennies, Shinzo Abe est parvenu à restaurer une continuité dans le pays. Entre les Abenomics et un certain nationalisme, quelles ont été les recettes de cette « réussite » du premier ministre ?

Il convient d’abord de noter que la campagne fut très courte, perturbée par un typhon, et qu’elle n’a pas passionné les foules. La participation est faible, comme c’est généralement le cas dans les élections japonaises, ce qui traduit une sort de fatalisme face à la domination écrasante du PLD depuis le milieu des années 1950, et le sentiment que les responsables politiques ne proposent pas des mesures de relance efficaces depuis une génération. Le cabinet Abe ne fait pas exception. Le résultat des Abenomics est médiocre, aussi le premier ministre ne pouvait utiliser la carte économique de la même manière qu’en 2012.

Mais comme il n’existe pas d’opposition crédible, la contradiction est absente. La question du renouveau nationaliste est plus complexe. Si Abe bénéficie du soutien des milieux nationalistes, il est en revanche très critiqué par les pacifistes, qui se sont notamment très fortement mobilisés contre sa volonté de réforme de la constitution. Les Japonais sont très divisés sur cette question, et cette division est d’ailleurs ancienne. Mais dans un contexte marqué par de fortes inquiétudes entourant la Corée du Nord, les pacifistes sont plus inaudibles que jamais. Cela ne signifie pas pour autant que les Japonais seraient, dans leur majorité, sensibles à un discours nationaliste, quel que soit le degré d’instrumentalisation de la menace nord-coréenne.

Quelles sont les prochaines réformes attendues pour le pays ? Comment peut-on anticiper le positionnement d’un Japon au niveau international, notamment dans les diverses crises qui traversent l’Asie au cours de ces derniers mois et de ces dernières années ?

Abe a annoncé que sa priorité est le dossier nord-coréen, avec une posture ferme. Ce qui au passage n’apporte rien de nouveau pour un pays qui multiplie depuis plusieurs années les sanctions unilatérales – peu efficaces – contre Pyongyang. On peut surtout s’interroger sur le sens de cette posture. Abe a-t-il l’intention d’accélérer sa volonté de réforme de la constitution? Envisage-t-il une action militaire contre la Corée du Nord? Tout cela ressemble plus à de la gesticulation qu’à un véritable programme politique, et il est hautement probable au final que le Japon ne modifiera pas sa position sur le dossier nucléaire nord-coréen, d’autant que la crise semble désormais s’apaiser, en attendant la prochaine.

Plus intéressant en revanche sera l’avenir de la relation avec Pekin. Abe a récemment montré des signes encourageants en vue d’apaiser les tensions entre les deux pays. Ce pourrait être, si les conditions sont remplies, la principale évolution de ce nouveau mandat du premier ministre japonais.
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